vendredi 25 avril 2008

Chance ou expérience?

Cette semaine, il m'est arrivé un incident qui aurait été totalement banal quand j'ai commencé à pratiquer la moto, dans les années 70, mais qui m'a surpris dans les circonstances. Alors que je revenais de St-Bruno, le moteur de mon Vespa a serré, soudainement, sans avertissement. Même si c'est monnaie courante avec un moteur deux-temps, ça faisait très longtemps que ça ne m'était pas arrivé. Et je dois avouer que je n'ai pas apprécié l'expérience outre mesure.

Je roulais dans la voie du centre, sur l'autoroute 20, en direction Nord, à l'approche du tunnel L.H. Lafontaine. Mon PX150 se sentait des ailes. L'air était frais et je bénéficiais de l'aspiration d'une minivan. Ça faisait un bon cinq minutes que je roulais à fond — c'est-à-dire 110-115 km/h — une vitesse presque supersonique pour mon vénérable Vespa. Devant moi, une minivan; à droite, un camion-citerne; derrière, un semi-remorque, et à gauche, une voiture. De chaque côté de la route, un muret de ciment n'offrant aucune échappatoire. La circulation était dense, mais ça roulait vite. Rien à voir avec le trafic de l'heure de pointe. Pourtant, c'était sûrement le pire endroit et le pire moment pour planter.

Quand le moteur a serré, la roue arrière s'est bloquée instantanément. Le temps que je tire l'embrayage à fond, je m'étais déjà mis à l'équerre deux fois. En laissant de magnifiques virgules noires sur l'asphalte. Un coup à gauche, un coup à droite. Je voyais ma roue arrière entrer et sortir de mon champ de vision comme si je faisais des figures de style libre en motocross. J'ai veillé à ne pas sauter sur les freins, j'ai relâché le gaz tranquillement et j'ai essayé de ne pas me raidir malgré le guidonnage. Quand j'ai finalement stoppé mon PX sur le bas côté, j'étais en un seul morceau. Mais j'entendais toujours le bruit strident des freins du camion qui me suivait et desquels un nuage de fumée s'échappait. Ça sentait la gomme brulée et le diésel. La circulation était maintenant presque arrêtée et je pouvais voir au regard des automobilistes que je n'étais pas seul à avoir eu la peur de ma vie. Après une minute ou deux, j'ai réussi à redémarrer mon Vespa. Le moteur n'était pas complètement saisi. Il s'agissait simplement d'une amorce de serrage — un «soft seize» comme disent les Anglais — que j'ai pu réparer à peu de frais, grâce à Jean-François, de chez Scootart, un spécialiste des vieux Vespa et autres Lambretta, qui a remplacé le piston et poli le cylindre.

J'avais pourtant parcouru près de 6 000 km sans problème avec ce kit DR180 réputé indestructible, en roulant souvent à pleine charge. Savez-vous faire autrement sur un scooter? Je ne m'attendais donc pas à ce qu'il serre ainsi. Apparemment, l'incident aurait été causé par une huile deux temps non adaptée au mélange manuel, ce dont je n'étais pas au courant, pas plus que le garage qui me l'avait vendue. Et au fait que j'étais sur la réserve, ce qui n'est pas idéal pour la lubrification.

Cette mésaventure m'a fait réfléchir. Quand on sort indemne d'un tel avatar, on a parfois tendance à remercier notre bonne étoile et à évoquer la chance. Pourtant, je suis convaincu que si j'avais eu moins d'expérience, je me serais planté à coup sûr. Et là, et seulement là, la chance aurait joué un rôle quelconque dans l'issue de la chute. Au cours de ma «carrière» de motocycliste, je me suis sorti de plusieurs incidents malencontreux. Le genre de moments que les Anglais — encore eux — qualifient de «close calls». Des moments dont on sourit après, en les racontant, mais avec une certaine appréhension rétrospective. Dans plusieurs cas, je suis persuadé que mon expérience ou la pratique de techniques de pilotage avancé m'ont sauvé la vie. Dans d'autres, ma bonne étoile ou un alignement favorable des planêtes m'a peut-être aidé. Qui sait?

Parfois, je me demande si les motocyclistes n'ont pas plusieurs vies, comme les chats. Si c'est le cas, la question qui m'importe est de savoir combien j'en ai déjà «brulées» et combien il m'en reste. Une chose est sûre cependant. Je vais continuer à perfectionner mon pilotage, ça peut toujours servir, et à piloter mon PX aux limites du raisonnable. Sinon, à quoi bon? D'ici un mois, je devrais recevoir un nouveau kit Pinasco qu'on me garantit hyper-performant et «bulletproof». Je vais peut-être enfin pouvoir dépasser 120 km/h sur le plat... sans serrer?

PS: si vous avez vécu des expériences similaires, n'hésitez pas à m'en faire part en postant un commentaire. Et dites-moi si vous vous en êtes sortis par chance ou par expérience.

mardi 15 avril 2008

C'était l'bon temps...

Ceux d'entre vous qui ont aujourd'hui passé la quarantaine se souviennent sûrement de l'époque bénie où l'insouciance, la recherche du plaisir et la contestation constituaient des valeurs sociétales. Bouffe, sexe, musique, boisson, drogue, voyages, moyens de locomotion... la jeunesse de cette époque profitait de tous les plaisirs de la vie. Sans retenue, ni préjugés. Chacun décidait alors de ce qu'il convenait de faire ou non en fonction des risques encourus et utilisait son esprit critique, son libre arbitre pour agir. Sans que la société sombre dans l'anarchie ou dans le chaos pour autant.

Aujourd'hui, le temps de l'hédonisme est révolu. Et les valeurs des années soixante sont ostracisées. Le balancier est revenu à sa position haute. Sur fond d'insécurité, de xénophobie, de sectarisme et d'intransigeance non assumés. L'épisode des accommodements raisonnables est très significatif à ce sujet. Bien que de nombreuses personnes aient exprimé ouvertement des propos racistes à l'occasion des réunions de la commission Bouchard-Taylor, laquelle tenait plus de la tribune téléphonique que du forum de discussion, ils se sont offusqués qu'on les qualifie de xénophobes. Une réaction typique des sociétés dans lesquelles la rectitude politique a remplacé la liberté de pensée et d'expression.

Nous vivons aujourd'hui dans un monde aseptisé, où le risque est une valeur rendue obsolète et où on dépense plus d'énergie à essayer d'empêcher les autres de faire ce qu'ils aiment — et nous déplait ou ne nous intéresse pas vraiment — qu'à militer pour défendre nos droits et nos acquis. Aujourd'hui, il est impossible de regarder un bulletin de nouvelles, de lire un journal ou une revue sans tomber sur un article sur la santé, l'environnement ou la sécurité. Des valeurs vertueuses, certes, mais aussi extrêmement dangereuses quand elles sont érigées en système. Et quand elles se substituent à la raison, à la réflexion et à l'exercice de l'esprit critique. En fait, je me méfie plus des ayatollahs du bien-vivre que je crains les rebelles ou les déviants. Comme le disait le philosophe Tretan Todorov dans son livre Mémoire du mal, tentation du bien, «Là où se lève l'aube du bien périssent des enfants et des vieillards.» À force de chercher à nous protéger envers et contre tout, à vouloir notre bien malgré nous, on nous rend la vie aussi fastidieuse et insipide qu'une condamnation à perpétuité au pain sec et à l'eau.

En ce qui concerne la moto, c'est la même chose. Depuis quelques années, on observe une volonté à peine déguisée de la SAAQ et des pouvoirs publics de nous faire disparaître des routes du Québec. Et, pour ça, on n'emprunte pas la voie de l'interdiction, mais on impose des tarifs (permis et immatriculations) tellement prohibitifs que, bientôt, peu de gens pourront pratiquer ce loisir, car — et c'est là un des problèmes — la moto est un loisir avant d'être un moyen de locomotion. Que ce loisir soit totalement futile et inutile n'arrange rien.

Pourtant, les motocyclistes sont favorables à des mesures qui amélioreraient leur sécurité. Des mesures qui s'appuieraient cependant sur des enquêtes pertinentes. Les études MAIDS (Europe) et Hurt (États-Unis) ont démontré que les causes d'accidents de moto ne dépendaient pas du type de moto, de la cylindrée ou de la vitesse. Les seuls facteurs pertinents seraient l'âge, l'expérience et le sexe du pilote. Pourtant, la SAAQ ne tient aucunement compte de ces données. Elle préfère mettre en place un système de catégorisation des motos et s'attaquer à la vitesse, deux mesures inefficaces, mais rentables économiquement et socialement.

Là encore, on démontre une méconnaissance totale de la réalité des motocyclistes. Un phénomène auquel nous sommes régulièrement confrontés. Quand les pouvoirs publics affirment que «se sont les jeunes qui pilotent des motos trop puissantes, qui engendrent des coûts d’indemnisation exorbitants...» ils sont soient mal informé, soit mal intentionné, ce qui est pire. Les statistiques montrent que l’âge moyen des motocyclistes est de 44 ans et que la vitesse moyenne lors des accidents est inférieure à 50 km/h dans la majorité des cas. Seuls 5% des accidents surviennent à plus de 100 km/h. Il est hypocrite de prétendre que les gens se tuent à cause de la vitesse. Parce que c’est faux. Et imposer des limitations de vitesse de plus en plus restrictives ne résoudra rien. Selon des études menées en Europe, si on augmente la vitesse maximale permise sur une route, le nombre d’accidents va augmenter pendant une période d'environ six mois, puis reviendra à la normale par la suite. Le même phénomène se produit quand on réduit la vitesse. Malgré les mesures coercitives mises en place (l'exemple des cinémomètres en France est éloquent à ce sujet), les conducteurs ne se comportent pas plus sagement aujourd'hui qu'avant l'instauration des photo-radars. On constate une amélioration à court terme, mais elle ne s'inscrit pas dans la durée.

En cherchant à réglementer à outrance, nos élus, encouragés par des experts de pacotille, pensent avoir trouvé la panacée. En fait, la dérive sécuritaire permet seulement à certains états, provinces ou municipalités de renflouer leurs coffres. Ils nous font ainsi payer indirectement les réductions d'impôts et de taxes qu'ils nous accordent lors des élections et leur incapacité à gérer les finances publiques. En tant qu'individus, si nous gérions notre budget comme le font nos gouvernements, nous serions tous en prison depuis belle lurette.

En refusant de s'attaquer aux vraies causes de l'insécurité routière (formation inadéquate, comportements humains, vieillissement de la population, infrastructures déficientes...), notre société se trompe de combat. Et choisi des solutions inefficaces. J'en veux pour preuve le fait que l'on permette encore l’usage des GPS et du cellulaire en mode «mains libres» en conduisant, malgré les études établissant leur dangerosité. Dans le même ordre d'idée, on ne peut pas simplement appliquer une méthode comptable pour résoudre le problème de l’insécurité routière à long terme. Il faut avoir une politique globale et concertée en la matière. Sinon on choisira des cibles faciles, selon des critères erronnés. Après les jeunes en sportives, visera-t-on les femmes en décapotables? Ou les vieux en Winnebagos? Aujourd'hui, on envisage de limiter le droit de conduire des aînés au-delà d'un certain âge, en raison de leur surreprésentation dans les statistiques d'accidents. Pourtant, je doute que la SAAQ aille de l'avant avec ce projet. Car, là encore, la démographie joue contre la société d'État. Les aînés représentent une force politique et une source de revenus importante pour le gouvernement. Ce que les jeunes ne peuvent pas revendiquer. Il suffirait d’imposer aux conducteurs de plus de 65 ans des examens médicaux plus fréquents, effectués par des médecins ne les connaissant pas, pour cibler ceux qui sont inaptes à conduire et révoquer leur permis. Le problème aujourd'hui c'est que l'on considère le permis de conduire comme un droit acquis, plutôt qu'un privilège qui nous est accordé sous certaines conditions. Accepteriez-vous de prendre l'avion pour le Sud en sachant que le pilote a passé la date de péremption et n'a pas suivi d'examen médical récent? Je ne suis pas sûr. Pourquoi, dans ces conditions, accepter de courir ce risque sur la route? Ça n'a tout simplement pas de sens...

Vivre dans les années postonzeseptembre est devenu très compliqué... et pas vraiment intéressant. Après nous avoir inculqué la peur de l'autre, de l’inconnu, nos gouvernements «sécuritaristes» sont en train de nous inoculer la peur de parler, de militer, de revendiquer... et de vivre! Fallait y penser...

mercredi 2 avril 2008

Merci de votre soutien

Depuis le lancement de motoplus.ca, je n'ai pas eu un moment à moi. Et je vous ai délaissé, malgré moi. En fait, je travaille plus en ce moment que je ne l'ai jamais fait ces dernières années. J'ai parfois l'impression d'être un chien qui court après sa queue... Un jour, je l'attraperais sûrement! C'est ce qu'il doit se dire, lui aussi.

Pourtant, je ne m'en plaindrais pas. La réponse que nous avons reçue des lecteurs, des gens de l'industrie et de tous les visiteurs anonymes depuis notre mise en ondes est énorme. Elle dépasse nos prévisions les plus optimistes. Elle me conforte dans l'idée qu'il y a non seulement de la place pour un magazine de moto en ligne au Québec, mais aussi un besoin. Pour une information variée et de qualité. Si l'équipe de motoplus.ca est réduite, ça ne l'empêche pas d'être composée de gens de talent, des passionnés qui œuvrent dans la moto depuis des années. Des journalistes désireux de partager leurs expériences avec vous et d'apprendre des vôtres.

À la lecture des messages que nous recevons ou de ceux qui sont postés sur le forum, je dirais que nous sommes appuyés par des lecteurs qui partagent avec nous la même passion et la même soif de savoir. Le même talent, aussi. Et je l'affirme en toute sincérité. Sans démagogie aucune. C'est ce qui m'encourage à continuer. À croire que l'ambition que nous nourrissons de faire le meilleur magazine de moto au Québec — qu'il soit imprimé ou en ligne importe peu en l'occurrence — n'est pas utopique. Il s'agit là d'une mission que nous ne sommes pas seuls à poursuivre apparemment.

Surveillez attentivement motoplus.ca! Au cours des semaines à venir, plusieurs chroniques inédites verront le jour et de nouvelles fonctionnalités seront ajoutées. Les vidéos vont prendre une place importante et nous allons entamer notre saison d'essais d'ici la fin du mois. En mai, je participerais aux festivités entourant les 60 ans de Honda, en Europe et je prendrais part aux Coupes Moto Légende. Des événements que je vous ferais vivre quasiment en direct. Restez en ligne et n'hésitez pas à nous faire part de vos commentaires ou à nous poser des questions. Nous sommes là pour ça.

Merci à vous tous du soutien que vous nous avez témoigné ces dernières semaines. Nous espérons que nous saurons être à la hauteur de vos attentes et que motoplus.ca deviendra VOTRE magazine....