mercredi 29 octobre 2008

Autres pays, autres mœurs!


Au Québec, la moto est une maîtresse encombrante — comme Julie Couillard pour Maxime Bernier — que l'on ne voit à la Une de l'actualité que pour les mauvaises raisons. La moto gène, indispose. Allez savoir pourquoi? Dire que le Québec et la moto ne vivent pas une grande histoire d'amour est un euphémisme. En fait, on a parfois l'impression que la Province nous ostracise. Sans raison. Sinon qu'on fait tache dans le décor. Et là, je ne parle pas des problèmes que nous rencontrons avec la SAAQ (permis, immatriculations, interdictions...) ou avec les forces policières (chasse aux sorcières, excès de zèle, répression...). Ces petits tracas font malheureusement partie de notre quotidien. Non, ce qui m'attriste, c'est la perception qu'ont de nous le public, les différents paliers de gouvernement et les médias généralistes.

En Italie, quand Valentino Rossi remporte son Grand Prix national, les habitants de Tavullia, sa ville natale, l'élisent «maire d'un jour» et le plus haut magistrat de la municipalité lui remet son écharpe en guise de remerciement. Quand il est couronné Champion du monde, c'est jour de liesse. Le village tout entier se réunit pour célébrer sa victoire : les fans, les commerçants, les élus, les mères de famille, les vieux du village, les enfants... Même les chiens sont de la fête. Pendant plusieurs jours, Tavullia a changé sa limitation de vitesse qui est passée de 50 km/h à 46 km/h (le numéro de Rossi) afin d'honorer l'enfant du pays. Tout le monde est fier de lui et qu'il soit motocycliste ne change rien à la reconnaissance qu'on lui témoigne. En Espagne, le roi Juan Carlos se déplace en personne au GP de Valencia pour assister à la course et encourager les pilotes locaux. À qui il rend visite dans leur garage, allant même jusqu'à leur serrer la main devant les caméras, comme s'ils étaient de vieux amis. Impensable chez nous! Lors des Jeux Olympiques de Pékin, le lutteur Indien Sushil Kumar s'est vu offrir une moto Royal Enfield par une des principales chaînes de télévision de son pays pour avoir obtenu la médaille de bronze en lutte libre, dans la catégorie des moins de 66 kg. Il faut dire que l'Inde, pays de plus d'un milliard d'habitants, n'a remporté que trois médailles lors de ces jeux, 1 en or et 2 en bronze. Aux États-Unis, Arnold Schwarzenegger, gouverneur de la Californie, se montre régulièrement en public à moto, sans que cela fasse scandale ou dérange le bon peuple. À Cologne, lors du salon Intermot, les représentants d'associations motocyclistes locales ont fait faire un tour de moto à leurs élus et aux personnalités invitées afin qu'ils prennent conscience des problèmes auxquels ils sont confrontés quotidiennement. La FEMA (Federation of European Motorcyclists’Associations) fait la même chose avec les députés européens, une fois par année. Les exemples de discrimination positive envers les motocyclistes ne manquent pas. Sauf au Québec.

J'aimerais qu'on m'explique enfin à quoi tient cette particularité québécoise (voire canadienne). Qu'on aille au-delà des clichés (motards criminalisés, bruit, vitesse...), lesquels affectent également les motocyclistes des autres pays, pour trouver les racines profondes de cette haine larvée envers les motocyclistes d'ici. Même si la «sécurite aiguë » frappe la plupart des pays industrialisés, je ne connais pas beaucoup d'exemples de pays, en dehors du Québec, où les autorités publiques tentent par tous les moyens de nous faire disparaître des routes à moyen terme. Car c'est bien de cela qu'il s'agit en ce moment. Arrêtons la langue de bois et appelons un chat, un chat.

Cette situation me fâche d'autant plus que nous ne cessons d'améliorer notre dossier de conduite, sans pour autant que le fait soit souligné par les autorités, voire récompensé. L'industrie et les motocyclistes dans leur ensemble se préoccupent de plus en plus de l'environnement, de la sécurité routière et font preuve de responsabilité citoyenne en se montrant respectueux des lois et règlements en vigueur. Ne parlons pas des rares exceptions pour une fois, voulez-vous! Les délinquants se retrouvent dans toutes les sphères d'activité et sur tous les véhicules, même en auto.

Ça fait des années qu'on nous demande de faire des efforts pour changer notre image et modifier nos comportements pour devenir plus acceptables socialement. Malgré cela, rien ne change. Ce qui me porte à penser que nous ne sommes peut-être pas le problème en fin de compte? Et si c'était à la société québécoise dans son ensemble de changer d'attitude? De faire preuve d'une plus grande ouverture d'esprit? D'un peu de tolérance? Car, aujourd'hui, le cliché qui veut que nous nous adonnions à notre passion parce que nous éprouvons un sentiment de liberté intense à moto ne tient plus. Jamais dans notre histoire, laquelle a quand même un peu plus de 100 ans, nous n'avons été autant brimés dans nos droits et dans notre liberté.