mercredi 21 janvier 2009

To scoot or not to scoot...

...là n'est pas la question!

Les scooters et autres maxiscooters envahissent nos routes depuis quelques années et s'imposent comme une mode avec laquelle il faut compter. Loin de se limiter aux ados, aux femmes et aux urbains en quête de mobilité, les scooters séduisent également certains motocyclistes qui les perçoivent comme une option pratique, confortable et éminemment plaisante à conduire. Ce qui est leur droit après tout.

Selon les prévisions de l’ACEM (Association des constructeurs européens de motocycles), près de 20 millions de scooters circuleront en Europe en 2016, contre 15 millions de motos. Et cette évolution du marché devrait également affecter l'Amérique du Nord, et donc le Canada, à plus long terme. C'est donc dire qu'il ne s'agit pas d'un épiphénomène du développement des deux roues motorisés, mais d'une tendance globale et durable.

Cette réalité est perçue par de nombreux motocyclistes purs et durs comme une menace à la pérennité de leur sport. Pourtant, je ne pense pas qu'il y ait là matière à s'alarmer. Car, dans la majorité des cas — et là je sais qu'il existe des exceptions — les gens qui roulent en scooter le font par choix délibéré et n'achèteraient pas forcément une moto. De plus, la conduite d'un scooter diffère de celle d'une moto. Ce sont deux véhicules complètement différents qui n'ont en commun que le fait d'évoluer sur deux roues. Et on peut aimer piloter les deux, indifféremment, pour les sensations particulières que chacun d'eux procure. Ce qui est mon cas. Je m'amuse autant sur mon antique Vespa PX150 à moteur deux-temps que sur la Honda Varadero de motoplus.ca. Mais pas de la même façon. Ni dans le même environnement.

Personnellement, j'aime mieux voir les gens se déplacer en scooter qu'en auto. Je me sens nettement plus près d'eux que des «caisseux». Et nos préoccupations quotidiennes, les défis auxquels nous faisons face et les brimades que nous subissons sont très similaires. Pratiquer une discrimination à l'égard des scootéristes est aussi dangereux et stupide que de faire une distinction entre les propriétaires de sportives, de customs, de motos double-usage ou de GT. Ça ne fait que nous diviser, nous opposer et ça donne des armes à nos adversaires qui ne se privent pas de les utiliser contre nous.

Dans un éditorial récent, Thierry Traccan, rédacteur en chef de l'hebdomadaire français Moto Revue fustige les scooters qu'il accuse de tous les maux: «Les scooters sont des purs produits raison... Or le deux-roues est avant tout synonyme de passion, de fun, d’exigence peut-être, mais d’une certaine philosophie de la vie. Or un scooter ne nous parlera jamais d’autre chose que de mobilité et de commodité.» Personnellement, je m'inscris en faux contre cette assertion qui émane d'une personne qui, à l'évidence, ne connait pas les scooters et se cantonne dans le lieu commun, le cliché facile. En fait, il s'agit d'une déclaration-choc et de bon ton qui ne vise qu'à flatter ceux qui se prétendent «purs et durs», détenteurs de la vérité universelle en matière de deux-roues. De plus, ce qui me gêne dans ce genre de prise de position c'est qu'elle implique qu'il faille faire un choix entre le scooter et la moto. Aimer l'un et détester l'autre. Comme si c'était une obligation. Une fatalité.

S'il est vrai que les maxiscooters attirent aujourd'hui des clients plus âgés (encore le syndrome anti «baby-boomers»?) «...qui privilégient le confort au sens large, qui cherchent à préserver leur vieux squelette, à soulager leur séant...», je ne vois pas en quoi c'est répréhensible. En vieillissant, l'Homme a tendance à s'embourgeoiser et les motocyclistes ne font pas exception à la règle. D'abord parce que ses moyens lui permettent d'accéder à des luxes qui lui étaient interdits auparavant, mais aussi parce que ses priorités changent. La souffrance et la privation ne sont pas des vertus et ne font pas des motocyclistes qui les pratiquent (ou les subissent) des «surhommes» de facto.

Personnellement, je me promène en deux roues depuis que j'ai 14 ans. En 36 ans d'expérience, j'ai accumulé des millions de kilomètres sur toutes sortes de motos, de scooters et de vélomoteurs. Et j'ai fini par réaliser que n'importe quel deux roues peut s'avérer une étonnante machine à voyager, au sens propre comme au sens figuré, pour peu qu'on s'attarde sur le voyage que l'on est en train de vivre. Les sensations que l'on éprouve. Les découvertes que l'on fait...

Photo : © Denis Vayer/motoplus.ca